Trésor de guerre (et de patience)
C'est là le trésor de guerre rapporté de la Droguerie il y a quinze jours.
La petite Bécassine que je suis ne "monte" à Paris que rarement. Ce week-end là, mon amoureux qui avait un congrès m'invitait à être du voyage. Seule le samedi, j'avais prévu d'occuper une bonne partie de mon après-midi à butiner dans la caverne d'Ali Baba. Pouvais-je prévoir qu'il annulerait son congrès pour que nous profitions pleinement du we tous les deux ?
Je vous le demande : était-il envisageable de faire de lui le témoin de mon état de transe dans un lieu ô combien futile comme celui-là ? Avoir l'air inspiré devant les statues de la basilique Saint-Pierre-de-Rome, c'est valorisant, mais être fascinée face à tous ces bocaux de perles, ces écheveaux de laine et ces mètres de ruban, c'est tout autre chose.
J'ai choisi de lui proposer d'aller flâner ailleurs (j'ai pas dit se faire voir, hein !), une heure, rien qu'une petite heure. Lorsqu'il est revenu à l'heure dite (il est systématiquement ponctuel et je suis systématiquement à la bourre) j'étais toujours en train de faire le pied de grue au rayon laine, n'osant m'éloigner d'un pas de crainte que la jolie jeune fille qui transformait les écheveaux en pelotes ne soit happée par une autre au regard fiévreux.
Je n'ai pu me résoudre à annuler ma commande. J'ai quémandé un délai et il est allé s'asseoir sur les marches de Sainte-Eustache, juste en face. Je ne suis venue le rejoindre qu'une bonne demie-heure plus tard. Il était contrarié et moi honteuse.
Mais il me trouve jolie comme un coeur avec le joli bérêt que j'ai tricoté depuis. Alors hein...